L'Agriculteur de l'Aisne 10 juin 2010 a 13h45 | Par Gaëtane Trichet

L’Europe gardera plusieurs modèles de production laitière

Quelles sont les pistes à suivre en production laitière avant et après l’arrêt des quotas en 2015 ? C’est à cette question qu’a répondu Stanislav Jas, lors de l’assemblée générale du syndicat départemental des producteurs de lait le 27 mai à Samoussy.

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Henri Noël Lampaert, président du syndicat des producteurs de lait de l'Aisne
Henri Noël Lampaert, président du syndicat des producteurs de lait de l'Aisne - © l'agriculteur de l'aisne

Développer et renforcer les actions collectives, obtenir une politique d’accompagnement, avoir les consommateurs de son côté, ce sont des idées fortes qui devraient permettre un avenir plus serein aux éleveurs. C’est en tout cas ce qu’a annoncé Stanilav Jas avant d’expliquer la position du COPA-COGECA.

Construire une PAC harmonisée

«Tout se joue cette année et l’année prochaine dans la construction de la PAC» a lancé d’emblée Stanislav Jas avant de détailler la production laitière en Europe et les différences entre ses pays membres sur les coûts de production, les conditions climatiques, les races de bovins, les prix, les modèles de transformation (coopérative, privé…), les positions politiques… «Nous devons tenir compte de tous ces éléments pour construire une politique harmonisée».

Aujourd’hui, l’Union européenne à 27 compte 1 million de producteurs, dont 115 000 en Allemagne et 85 000 en France. Deux pays qui représentent à eux seuls 47 % de la production européenne, suivis par le Royaume Uni, l’Italie et les Pays-Bas. C’est dire le poids de l’Allemagne et de la France dans les négociations à venir.

 

Stanislav Jas, du COPA-COGECA
Stanislav Jas, du COPA-COGECA - © l'agriculteur de l'aisne

Des positions sur l’avenir de la production laitière se profilent

Alors comment construire l’avenir ? «Il nous faut une régulation» a-t-il expliqué clairement. «Avec la libéralisation et les interventions de Bruxelles, nous avons perdu des repères importants dans le secteur laitier. Un secteur qui a besoin de stabilité et d’équilibre. Mais aussi de prévisibilité pour faire des investissements sur le moyen et le long termes. Une variabilité des prix n’est pas adaptée et fragilise les exploitations laitières». Selon l’intervenant, Dacian Ciolos, commissaire à l’agriculture, se prononce pour la régulation. «La fin du régime des quotas doit être subordonnée à la mise en place d’un ensemble de mesures d’accompagnement et d’une orientation politique communautaire claire pour l’après 2015» a-t-il insisté. «Une plus grande compétitivité de l’Europe ne doit pas se faire au détriment du revenu et du prix payé aux producteurs et de l’abandon de l’élevage laitier dans les zones fragiles. D’autres pistes d’adaptation de la production aux marchés doivent être étudiées». C’est pourquoi le COPA-COGECA souhaite maintenir la préférence communautaire dans les négociations sur le commerce international, conserver tous les outils européens de gestion de marché existants, les paiements uniques et enfin, il entend réduire la volatilité des cours et cotations avec de nouvelles mesures de prévention et de gestion des risques à l’échelle de l’Union européenne.

Travailler collectivement pour mieux maîtriser le marché

La réflexion du COPA-COGECA vise l’amélioration du prix du lait, la réduction des coûts de production et des charges administratives, tout cela dans un marché plus transparent dans son organisation et sur l’origine des produits. L’organisation syndicale européenne veut assurer un équilibre entre les maillons de la chaîne alimentaire en renforçant notamment le poids des producteurs au travers d’une organisation forte face à la concentration de l’offre. «Les négociations devront être collectives». La contractualisation devient également essentielle aux yeux de Stanislav Jas.

Le groupe de haut niveau européen sur l’avenir du secteur laitier doit rendre un rapport à adopter le 15 juin dans lequel seront proposés les contours de la PAC d’après 2013 ainsi que le budget agricole entre 2013 et 2020. «Nous avons tenu compte de la nécessité des filets de sécurité, du rééquilibrage et de l’obtention d’un prix rémunérateur, et d’une juste répartition dans la filière. Nous y avons inclus la contractualisation qui permettrait d’équilibrer les marchés, le rôle des interprofessions et enfin le rôle des consommateurs. Toutes ces mesures doivent être mises en place avant 2015 pour les tester afin de les confirmer ou les infirmer dans les accords définitifs». La vision européenne a semble-t-il, évolué ces derniers temps. «Elle est davantage à l’écoute et prête à réfléchir sur un monde nouveau et le Parlement européen reste du côté des producteurs».

L’essentiel : maintenir une vraie politique agricole

Stanislav Jas en est sûr : «l’Europe continuera à avoir plusieurs modèles de production laitière». Et ce, malgré la concentration des industriels et de la grande distribution. «Un modèle unique européen n’existe pas et il serait illusoire qu’il s’en crée un dans l’avenir. En revanche, ces modèles vont entrer en concurrence et leur coexistence doit être corégulée pour le bien de tous». C’est pourquoi il est essentiel de maintenir une vraie politique agricole européenne dans l’intérêt des producteurs de lait, des entreprises laitières et des consommateurs.

gaetane trichet

(*) COPA-COGECA. Cette organisation syndicale au niveau européen représente les agriculteurs et les producteurs forestiers dans pour le COPA, les coopératives pour dans la COGECA. Stanislav Jas, de nationalité tchèque, est chargé des productions animales (lait, viande bovine, viande ovine et caprine, bétail de reproduction et miel).

 

Miser sur le collectif pour demain

«Dacian Ciolos, le nouveau commissaire européen à l’agriculture a confirmé en mars dernier, l’arrêt des quotas laitiers en 2015. Depuis plus de 2 ans, la FNPL s’implique dans ce dossier fondamental et complexe pour l’avenir des producteurs. Complexe, car il nécessite la remise en cause de la gestion de la maîtrise de la production qui existe depuis 1984 et parce qu’il demande un travail de structuration des producteurs» a expliqué Henri-Noël Lampaert. «L’objectif qui doit nous guider est de renforcer le pouvoir des producteurs au sein de la filière. En effet, la capacité de négociation d’un producteur de lait face à son transformateur est déséquilibrée du fait de sa taille économique» a-t-il insisté avant de revenir sur la contractualisation. «La relation contractuelle entre producteurs et transformateurs doit être encadrée par les pouvoirs publics par le biais de la loi de modernisation agricole. C’est aux producteurs d’en être les acteurs sans pour autant la subir. Pour fonctionner correctement, un guide de bonnes pratiques contractuelles, basé sur un document partagé, devra se mettre en place, avec l’esprit dans lequel la filière souhaite construire l’avenir».

Henri Noël Lampaert a cependant expliqué toute l’urgence d’organiser les producteurs au sein de structures collectives suffisamment importantes pour peser dans la négociation tarifaire régionale. «Pour notre région et notre département le pouvoir d’organisation collective doit être privilégié plutôt que l’individualisme, voué à l’échec. C’est tous ensemble que nous nous en sortirons»

 

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